Histoire de la collection

La collection française des plans-reliefs est l’héritière d’une tradition née au XVIe siècle en Europe. Il était en effet courant pour les ingénieurs militaires de réaliser des maquettes pour représenter leurs projets de fortifications, les forteresses d’un territoire, ou encore les travaux de siège dirigés contre une ville.

Portrait de Louvois © Paris, Musée des Plans-reliefs
Portrait de Louvois
© Paris, Musée des Plans-reliefs

La collection de Louis XIV est née en 1668, avec la commande que Louvois, ministre de la guerre, passe à Vauban du plan-relief de Dunkerque. La réalisation des premiers plans-reliefs avait pour objectif d’accompagner les travaux de fortification menés par les ingénieurs de Louis XIV dans les places fortes des Flandres espagnoles récemment conquises. Conçues comme de véritables outils d’expertise à distance pour le roi et son état-major, les maquettes figuraient en trois dimensions l’état d’avancement des travaux dans une place forte, présentant d’abord les projets, puis les réalisations en cours, et enfin les fortifications achevées.

Détail d’une miniature de Nicolas Van Blarenberghe ornant une tabatière du duc de Choiseul © Paris, Musée des Plans-reliefs
Vue de la collection des plans-reliefs quand elle était installée au Louvre. Détail d’une miniature de Nicolas Van Blarenberghe ornant une tabatière du duc de Choiseul, ministre de la Guerre de Louis XV, vers 1770 (collection particulière)
© Paris, Musée des Plans-reliefs

Ce mode de représentation en trois dimensions offrait au monarque une vision globale des différentes fortifications du royaume, révélant de manière immédiate la nature du nivellement de chacune des places fortes et de leur défilement. Cette facilité d’appréhender les sites connut un grand succès, et Louis XIV commanda très vite la réalisation des modèles des nouvelles défenses du royaume. Plus que de simples instruments de travail, les plans-reliefs deviennent à partir des années 1680 un moyen prestigieux de représentation des défenses du territoire. Louis XIV décide en 1700 d’installer la collection au Louvre, dans la galerie du Bord-de-l’Eau.

Plan-relief de Saint-Omer © Paris, Musée des Plans-reliefs
Plan-relief de Saint-Omer
© Paris, Musée des Plans-reliefs

Le développement de la collection se poursuit sous la Régence et tout au long du règne de Louis XV. De nombreuses maquettes sont de nouveau construites notamment pendant ou après la guerre de Succession d’Autriche (1741-1748), soit pour représenter les fortifications nouvellement conquises, soit pour actualiser la collection en remplaçant les plans-reliefs jugés périmés. Parallèlement, le ministre de la guerre commande en 1754 la restauration de l’ensemble des plans-reliefs. Ce travail d’entretien, s’il marque l’intérêt porté à ces prestigieuses maquettes par Louis XV et son état major, signe l’amorce du déclin de la collection. Après cette date, seuls les plans-reliefs de Saint-Omer (1758) et du fort Saint-Philippe aux Baléares (1759) sont réalisés : ce sont les deux derniers plans-reliefs construits sous l’Ancien Régime. Puis en 1774, la collection manque d’être détruite pour libérer au Louvre la galerie du Bord-de-l’Eau afin d’y installer un musée de peinture. Elle est finalement déménagée en 1777 dans les combles de l’hôtel des Invalides où elle se trouve toujours. Les ingénieurs et ouvriers attachés à la galerie se consacrent pendant vingt ans à la réparation des maquettes grandement endommagées lors du déménagement.

Détail du plan-relief de Cherbourg © Paris, Musée des Plans-reliefs
Détail du plan-relief de Cherbourg
© Paris, Musée des Plans-reliefs

Il faut attendre la Révolution, mais surtout la période napoléonienne, pour que l’art des reliefs connaisse un renouveau. L’empereur, commande la réalisation des maquettes des principaux arsenaux maritimes et terrestres nouvellement aménagés ou à implanter dans les territoires récemment conquis : Luxembourg (1802), La Spezia (1811), Brest (1811), Cherbourg (1811-1813). Les plans-reliefs de cette période, réalisés à partir de la méthode de relevés topographiques par courbes de niveau sont désormais d’une précision remarquable.

Après la chute de l’Empire, la galerie a entrepris de remplacer les plans-reliefs saisis par les Prussiens en 1815, mais aussi de suivre les nouveaux travaux de fortification réalisés sur le territoire. C’est ainsi que des maquettes ont été réalisées tout au long du XIXe siècle pour visualiser des projets difficiles à traiter dans des lieux très accidentés, comme ceux du fort l’Ecluse (1832-1841) ou de Grenoble (1839-1848). La construction des plans-reliefs s’achève en 1870, avec l’abandon en France de la construction des fortifications bastionnées.

Exemple de modèle théorique de fortification : une tour Martello. © Paris, Musée des Plans-reliefs
Exemple de modèle théorique de fortification : une tour Martello.
© Paris, Musée des Plans-reliefs

De 1668 à 1870, 260 plans-reliefs représentant 150 sites fortifiés implantés aux frontières du royaume et jusque dans les anciennes possessions françaises ont été construits. Cette collection unique au monde, classée monument historique depuis 1927,  conserve aujourd’hui une centaine de plans-reliefs, dont quinze sont en dépôt au Musée des Beaux-Arts de Lille. Elle est complétée par une importante série de modèles théoriques de fortifications, conçus entre le XVIIIe et le XIXe siècle pour servir à l’enseignement des élèves des différents corps d’armée, par des plans-directeurs en relief au 1/20 000, ainsi que par des cartes et reliefs topographiques. Le Musée des plans-reliefs, créé en 1943, est rattaché à la Direction de l’architecture et du patrimoine du Ministère de la culture et de la communication. En 1997 ont été inaugurées les deux premières galeries du musée, en cours de réaménagement.